Lorsque tu travailles sur une île mais vit sur une autre, tu dois prendre chaque matin un bateau. Si c'est en Polynésie, la garantie d'un beau voyage est quotidienne: le bleu du lagon se reflète sur les ailes blanches des sternes - c'est très exactement le bleu des bonbons schtroumpf, ravissant - tu peux apercevoir des dauphins, une tortue, une raie manta. Entre Raiatea et Tahaa, par exemple, le trajet est celui-là :
Le soleil se couchant tôt, en rentrant autour de 17 heures tu peux le voir caresser de ses rayons colorés l'île de Bora-Bora, si reconnaissable, si familière. C'est bien, les archipels, l'oeil porte loin mais croise des lieux habités avant de se perdre dans l'immensité. Le soir, il reste des guirlandes de lumières et on se sent moins seul.
Cela, c'est l'autoroute du bonheur, aller simple direct au coeur de la beauté.
Mais !
Tous, actuellement, traversons cette période où nous n'avons pas ce que nous souhaitons. Nous projetons, défaisons nos projets, nous les remettons sur l'ouvrage, nous rêvons d'échappées, de retrouvailles, de chaleur, nous lançons des souhaits pour une année différente, nous nous prenons des murs en face à face, des déceptions. Rien à faire: l'autoroute est barrée.
L'achoppement est notre lot partagé.
Restent deux solutions.
Espérer et miser sur une réalisation future, une levée des obstacles; attendre et reporter. Compter sur un mieux, plus tard. Pas trop tard, si possible, parce que nous imaginons que ça va être difficile. Que nous ne le supporterons pas. Qu'à force de tirer ça va craquer. Naturellement, c'est une voie, et parfois le barrage est levé dans les temps. Ouf !
L'autre ? "Tout lieu est un lieu pour être", a dit le sage Swâmi Prajnânpad. Ici, maintenant, en soi. Si l'autoroute est fermée, il me reste mille et mille chemins, aussi étroits soient-ils. Et beaux, et différents, et inattendus. Bien plus faciles d'accès que mon mental l'imaginait, dès lors que je m'offre de lâcher des certitudes, de changer des habitudes, d'oser, d'accepter les déroutes, de traverser les errances, les fatigues, de laisser les lignes bouger. Quelle joie, d'y découvrir des personnes bien plus aimantes, des sourires, des lumières, des ressources !
A tous, en 2021, je nous souhaite seulement la santé nécessaire, et l'élan pour explorer ce qu'il y aura à rencontrer.