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  • Photo du rédacteurElisabeth

Lagon

Dernière mise à jour : 17 nov. 2020




Ne crois pas, grands dieux ! que les îles s'exposent sans protection à tous les vents !


Du moins: elles s'offrent aux vents, qui les érodent souffle après souffle. Cela les rendrait du reste semblables à n'importe quelles montagnes, s'il n'y avait en plus cette dynamique de leur évolution qui veut qu'elles décroissent naturellement jusqu'à s'enfoncer complètement dans l'eau, réservant in fine au monde marin le spectacle de leurs trésors.


C'est un fait: Bora Bora sera un jour la propriété exclusive des poissons trompettes, des murènes et d'obscures créatures à branchies. Les panneaux indiquant aux clients des restaurants le nom des stars ayant honoré leurs tables s'effaceront devant les anémones. Amen.


Pour se protéger contre les crachats de l'océan, l'organisation mondiale des îles volcaniques a inventé un concept radical: le lagon.


Il serait en effet trop dangereux de laisser la houle déferler et exercer sa pression insoutenable contre les roches fragiles.


Le lagon, c'est un mur dressé sous les eaux, sur lequel se brisent les vagues que l'océan roule depuis des milliers de kilomètres. Dans ton jardin avec vue sur Bora, tu entends ce bruit perpétuel: un bruit blanc qui s'invite à ton petit déjeuner et au coucher de ton enfant. Le bruit du monde au-delà du lagon.


Ce mur de corail n'est pas tout contre l'île, il est un peu plus loin, de sorte qu'une petite mer intérieure est aménagée, partagée avec ceux qui, comme toi, habitent là: les animaux marins et tes voisins. Le haut des îles étant souvent escarpé et peu accessible, tu disposes du bas de l'île pour tes activités terrestres et du lagon pour tes activités heureuses.


Et cela pourrait tellement suffire !

Les îles n'ont pas d'autres protections: les cyclones ne les épargnent pas plus que les dangers de la malbouffe ou des séries de seconde zone. Aucune île ne peut survivre sans échanges avec le monde au-delà du lagon. Et tout échange comporte un risque. Naturel.


J'attire ton attention sur un détail: le mur de corail qui permet de maintenir l'île à l'abri des flots déchaînés doit nécessairement comporter de petites ouvertures. On les nomme les "passes": elles permettent aux bateaux de circuler, aux baleines de venir te faire un petit coucou, et surtout, elles permettent de RENOUVELER l'eau du lagon.


Dans les lagons excessivement fermés, une algue microscopique s'installe et les poissons développent une maladie, la ciguatera, qu'ils transmettent aux hommes. Ces derniers la nomment la "gratte" mais détrompe-toi, elle ne fait pas que les démanger: elle les fait vomir, les rend fiévreux, fatigués. Elle leur fait mal.


Il faut donc aux îles, pour se préserver des déferlantes :

un mur de corail

ainsi que

des passes suffisantes.


Pour les autres dangers, les îliens ont bien heureusement le courage.


Enfin, un jour, il ne reste plus que cette barrière, la protection a pris le dessus sur l'île et cette dernière s'est enfoncée dans l'eau, le lagon subsiste sans ses habitants et seules quelques tortues viennent y pondre.

L'île est devenue un atoll.

L'atoll, c'est le souvenir d'une île perdue pour l'usage des hommes.

Sur la commune de Bora Bora, celui de Tupai m'a offert son coeur lors d'un vol en avion. Lagon rimait si bien ce jour-là avec cocon !










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